La Cuisine bel-abbèsienne par MoMedj

Le temps des cueillettes.

Avant de se mettre à traquer gigots et côtelettes , l'homme fut un invétéré herbivore. De long millénaires se sont écoulés avant qu'il ne dresse une nomenclature des végétaux viables. A-t-il recouru au tâtonnement ou bien s'est il contenté d'observer comment se nourrissaient les bêtes pour démêler le comestible du vénéneux? Peut être les deux à la fois. D'abord en imitant l'animal, dont il n'était pas loin d'ailleurs, ensuite, peut être, sous l'impulsion d'un besoin qui deviendra le raffinement, l'expérimentation de nouveaux produits végétaux devint-elle nécessaire. Les migrations ont également demandé le sacrifice de quelques un des membre du clan avant que celui-ci ne s'adapte à son nouvel environnement alimentaire. Il est émouvant de songer, au cours des millénaires, à toutes les tentatives de ces explorateurs inconnus, obscurs et courageux, qui furent les premiers à goûter tel fruit, à mastiquer telle racine, et dont tant et tant durent payer de leur vies cette téméraire audace. Seules quelques maigres protéines animales, souris, rats, serpents, insectes, vers, grenouilles, coquillages, escargots venaient agrémenter le menu quotidien. Mais c'était déjà le prélude à un régime de plus en plus carné, évoluant en fonction de l'évolution des techniques de chasse, et , plus tard, de la domestication de certaines espèces. Les hommes n'en deviendront pas pour autant exclusivement carnivores. Et si la cueillette est révolue il iront chercher leurs rations de verdure dans le potager voisin, puis au marché.

HERBE SAUVAGE

Dans le registre des herbes comestibles et aussi paradoxal que cela puisse paraître dans un environnement de grande richesse agricole, c'est une de ces herbes dite "sauvage" qui semble faire le lien dans ce patchwork culinaire. Il s'agit de fameuse khobiza dite également khobaiza,, b'qol,, amjir à travers le reste de l'Algérie. C'est la Malva sylvestris des botanistes vulgairement appelée mauve. Cette herbe comestible au vertu alimentaire et phytothérapeutiques certaines , elle favorise le transit intestinal et constitue un excellent adoucissant pulmonaire, est très commune dans les champs, elle y pousse toute l'année , mais c'est surtout à l'automne qu'elle est appréciée. Produit courant des marchés, il est préférable d'en faire la cueillette sois même en plein champs en évitant celles des bords de chemins à cause de la pollution. La consommation de ce légume, c'en est un, est également très répandue sur tout le terroir oranien.
Les feuilles de mauves enfilées a travers une ficelle faisaient un "pitchac'", constitué à l'origine avec des rondelles de chambre à air de bicyclette, qui remplaçait le ballon pour jongler.

KHO'BIZA à
la Bel-abbésienne

Pour 4 pers.
4 bottes de khobiza (feuilles et tiges de mauve).
12 olives façon Grèce (zitoun m'tamar).
6 gousses d'ail grossièrement hachées.
1 piment sec (sassafinda) débarrassé de ses graines et concassé.
4 cuillerées à soupe d'huile d'olive.
1 feuille de laurier.
Sel, poivre.
Laver à grande la khobiza, faire égoutter, puis hacher menu. Passer à la vapeur dans un couscoussier env. 15 m.
Faire chauffer l'huile, 2 à 3 m., dans une casserole ou un faitout, réduire le feu, et commencer par y faire revenir le piment, l'ail, les olives et la feuille de laurier 2 à 3m., puis verser la khobiza par dessus. Bien mélanger couvrir et laisser mijoter à couvert 7à 8m.
La préparation se mange chaude, tiède ou froide, comme un hors d'œuvre ou à "l'algérienne" en accompagnement de tout le repas, avec du pain d'orge de préférence. à suivre...